Imaginez, demain les sirènes retentissent, les bombes tombent, les gens tuent et meurt et la liberté que vous connaissiez disparait en même temps que vos voisins ou vos amis ou votre maison … Vous apprenez la peur et la méfiance, vous tremblez au moindre bruit qui résonne dans votre refuge.

Les journées ne sont que bruits et hurlements, viols et tortures. Vous dormez peu, mangez peu et pire que tout, votre enfant vit et voit les mêmes horreurs que vous.

Le sentiment de sécurité que vous avez connu n’est qu’un lointain souvenir . Vous le regardez et vous savez que vous pouvez le perdre en moins de temps qu’il n’en faut pour le penser. Vous essayez de le rassurer, de le consoler, de lui dire que tout ira bien, mais vous-même n’y croyez plus.

 

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Si demain j’étais assez désepérée pour abandonner mon ancienne vie, partir sans rien, partir sans eux. Si demain j’étais si effrayée que je remettais mes économies,  ma vie et celle de mon fils entre les mains d’escrocs, sachant très bien qui ils sont … mais sachant aussi qu’ils sont peut-être notre dernier espoir.

Si demain, à bout de force , je décidais de tenter le tout pour le tout et de voyager entassé dans un camion ou dans un bateau surchargé. Si je décidais de risquer encore une fois la vie de mon fils, de le faire marcher sur des kilomètres, de le pousser jusqu’à ses dernières forces parce que je pense qu’il y a un espoir ailleurs …

Si demain j’étais une migrante que ressentirais-je si, une fois arrivés là où la mort n’est pas la seule option, j’étais reçu comme une moins que rien ? Et mon enfant, comment le vivrait-il ? Comment pourrais-je encore lui faire croire qu’une vie meilleure nous attend ?

 

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Se rendent t-ils compte, assis dans leur fauteuils, devant leur télévision, de tout ce que nous avons enduré ? Peuvent-ils imaginer cette peur qui prend aux tripes, l’effroit quand les premières morts surviennent, l’impression d’être vidé de toute substance quand la chair de sa chair commence à montrer des signes de faiblesse.

Puis les larmes de joie en voyant la « terre promise », parce que nous sommes enfins arrivés, mais surtout parce que nous sommes encore vivants.

Je ne veux pas leur voler leur pays, leur travail, leur bien-être.

Je ne leur demande rien d’autre que de voir mon fils grandir, en sécurité et en bonne santé. Je ne demande pas la charité, je demande juste de l’aide, un avenir.

D’un Humain à un autre.

 

 

Photo de Une : Migrant Mother de Dorothé Lange
Photo 2 : Daniel Etter
Photo 3 sur 7sur7.be